Une étude suggère que la façon de raisonner des enfants leur permet d’apprendre à utiliser de nouvelles technologies plus facilement que les adultes.
« Ma fille de trois ans maîtrise ma tablette sur le bout des doigts, mieux que moi ! » s’étonne une maman. Sans juger si cela est « bien » ou « mal » pour l’enfant, on constate que les plus petits s’en sortent bien avec les technologies d’aujourd’hui, comme si cela leur était intuitif. Tout semble facile à utiliser entre leurs mains. C’est probablement en partie vrai : Christopher Lucas, de l’Université d’Édimbourg en Écosse, et ses collègues de l’Université de Californie ont montré que les enfants âgés de moins de six ans ont un raisonnement plus souple, lié à moins de « préjugés », que les collégiens et les adultes ; ils peuvent donc apprendre plus facilement une nouvelle technique.
Il y a un peu plus de 30 ans, nombre de psychologues ou psychiatres pensaient que les bébés et les jeunes enfants étaient incapables de raisonner, d’établir des liens de cause à effet ou de comprendre les intentions ou les pensées d’autrui. Progressivement, les chercheurs et médecins ont découvert que les enfants en savent bien plus qu’on ne le pense : ils raisonnent et acquièrent des connaissances sur le monde en faisant des expériences et en tirant inconsciemment des conclusions statistiques de leurs observations. Et ils apprennent de cette façon. Chr. Lucas et ses collègues vont plus loin : la flexibilité de leur capacité de raisonnement, sans idées préconçues ni connaissances antérieures, leur permettrait d’apprendre plus vite que des collégiens ou des adultes.
Les psychologues ont fait jouer 106 enfants de quatre et cinq ans et 170 collégiens à un jeu de construction un peu particulier, qu’ils ont nommé Blickets : des formes (des cubes, des pyramides, des cylindres, des boules, etc.) placées sur une boîte rouge peuvent allumer celle-ci et déclencher une musique. Mais les combinaisons de formes qui fonctionnent – les blickets – ne sont pas forcément les plus évidentes pour nous autres les adultes.
Flexibilité mentale
De fait, les enfants trouvent plus facilement que les collégiens les combinaisons de pièces « inhabituelles » qui déclenchent le mécanisme. Les collégiens cherchent surtout à trouver les formes isolées qui fonctionnent et ne pensent pas que des combinaisons de pièces pourraient activer la boite (même si les expérimentateurs leur suggèrent de tester des associations de pièces).
L’exploration des jeunes enfants est ainsi plus large, et ils en déduisent davantage de combinaisons gagnantes. Cette façon de raisonner par « inférence bayésienne » permet aux tout-petits de déduire la probabilité d’un événement – ici la combinaison de pièces qui allume la boîte – à partir des combinaisons qu’ils ont déjà trouvées. Dans leur cerveau, l’absence relative d’expériences antérieures avec des jeux de construction, de souvenirs et d’idées préconçues laisse la porte ouverte à toutes les possibilités. D’où, sans doute, leur apparente facilité à utiliser n’importe quelle machine moderne !