La musique burkinabè se porte mieux , peut-on risquer de le dire. A côté des jeunes artistes émergents, la crème de talents qui ont fait vibrer les mélomanes dans les années continuent d’émerveiller leur public. Parmi eux, figure Alif Naba surnommé le prince aux pieds (Ndlr, lors de ses prestations, l’artiste monte sur scène pieds nus). L’auteur compositeur a su allier pop-folk et musique traditionnelle moagha, pour créer son propre style, rythmique, méditatif. À quelques heures de la sortie de de son 5e album, zoom sur sa carrière musicale.
L’auteur-compositeur et interprète, Alif Naaba est issu d’une famille nombreuse et descendant de la lignée royale du Naaba Konkiss. Très tôt plongé dans la musique traditionnelle, par les mélodies fredonnées par sa mère qui est chansonnière, Alif Naaba s’essaie à divers styles musicaux jusqu’à ce qu’il décide de créer une démarche propre à ses inspirations profondes. Sa musique associe des compositions Jazz, pop-folk et musique traditionnelle moagha, pour créer un style spécifique, une musique Afro-Groove influencée par le terroir. En effet, les belles mélodies de Alif, revisitent les traditions musicales du peuple Moagha dans des ballades enjouées ou intimistes, qui se teintent parfois de reflets jazzy ou d’inspirations pop africaines. Et qui tressent alors des chants émouvants évoquant les causes sociétales et environnementales qui traversent l’Afrique de l’Ouest d’aujourd’hui. En 1999, il enregistre Regards Métis, son premier album en Côte d’Ivoire où il a vécu jusqu’en 2003 avant de rentrer dans son pays , le Burkina Faso. Les Kundé (trophées de la musique burkinabè) le sacrent meilleur artiste de la diaspora en 2004 pour Regards métis. En 2005, il sort son second opus, Foo qui est également primé au Kunde pour le prix de la meilleure chanson francophone. Il sort l’album Wakat en 2009 et YIKI (2013). “Et maintenant” est un single sorti en 2015 pour sensibiliser sur le réchauffement climatique dans le monde. Dans son dernier single sorti en décembre 2019, intitulé Gomdé, s’il évoque “en passant” le sujet du terroriste qui déstabilise le nord du Burkina Faso, Alif Naaba s’interroge dans le chant : “Où allons , avec les armes qui crépitent partout? Où allons-nous aller si l’humanité n’existe plus?. Dans le chant, la situation des enfants abandonnés dans la rue n’échappe pas au regard du chanteur. En 2020, en pleine pandémie au Covid-19, Alif Naaba sensibilise contre Le Coronavirus dans une belle chanson Intitulée “Corona Tiim”. Son nouvel et cinquième album, SO WOK dont est issu le titre Gomdé est prévu pour sortir le 11 juin.
Création du centre Paongo
En 2015, Alif Naaba met un centre de création à la disposition du monde des arts dénommé Paongo, qui signifie en langue mooré « la richesse ou encore le gain ». Le centre, qui est une initiative de La cour du Naaba (label de production), vise à réunir des artistes nationaux et internationaux afin de stimuler la création artistique à partir de repères. C’est ainsi que, selon le promoteur et directeur du centre, « des sommités de la musique africaine telles Didier Awadi, Ismaël Lo, Lokua Kanza et bien d’autres ont accepté d’apporter leur contribution pour booster le développement de la filière musicale au Burkina Faso ». Dans sa carrière musicale, Alif Naaba écrit la musique commémorant le 15ème anniversaire du génocide au Rwanda, dans la comédie musicale Nguwino Ubeho. Ses passages au Globalfest 2010 à New York et au prestigieux festival international de Cervantino laissent envisager un avenir prometteur pour ce jeune talent de la nouvelle scène africaine. En 2012, Alif Naaba est lauréat de « Visa pour la Création » (VPC) du Ministère français des Affaires étrangères et de l’Institut Français.
Pierre Oued.
Source : https://www.musicinafrica.net/fr/magazine/la-musique-moderne-au-burkina-faso