Procès du coup d’Etat manqué du 15 septembre au Burkina: les avocats de la défense quittent la salle
Tant attendu par le peuple burkinabè, c’est aujourd’hui 27 février 2018, que s’est ouvert le procès du coup d’Etat de septembre 2015. C’est la salle des banquets de Ouaga 2000 qui a servi de cadre pour la tenue de ce procès, afin de le rendre public au plus grand nombre du peuple burkinabè. Malheureusement, après l’ouverture, le procès a été suspendu après le retrait de tous les avocats de la défense.
Au total, 84 accusés sont appelés à la barre ce mardi 27 février 2018, au tribunal militaire à Ouagadougou. Parmi les accusés figurent Gilbert Diendéré, ancien chef d’état-major particulier du président Compaoré, et Djibrill Bassolé, ex-ministre des affaires étrangères, tous deux considérés comme le cerveau du putsch manqué du 16 septembre 2015.
Dès l’entame du procès, les avocats de la défense ont attaqués sur la forme notamment la composition de la Cour. Pour eux, les membres du tribunal ne sont pas habilités pour juger une telle affaire. Pour la défense les accusés doivent comparaitre devant la chambre de jugement alors que l’instance présente est la chambre de première instance. Ils se sont donc retirés parce qu’ils contestent la légalité du tribunal militaire, composé de deux magistrats professionnels et de trois militaires ayant rôle d’assesseurs. « Nous nous retirons parce que la juridiction devant juger cette affaire n’est pas légale », a affirmé Michel Traoré, avocat de l’ancien chef d’état-major Boureima Kéré. Une position soutenue par Mathieu Somé, avocat du général Diendéré.
Quant aux avocats de la partie civile, visiblement cela n’est pas une surprise car, selon Me Guy Hervé KAM dans ces genres d’affaires, les charges pesantes sur les personnes poursuivies sont énormes. « En général, il est utilisé ce que l’on appelle la défense de rupture, c’est-à-dire chercher par tous les moyens à discréditer la juridiction qui va siéger. C’est exactement ce qui s’est passé aujourd’hui. De toutes les façons, nous y reviendrons. Tôt ou tard, les personnes poursuivies devront rendre compte devant le peuple burkinabè », explique Me KAM. Pour lui, montre que c’est la preuve que ces gens qui disent qu’ils sont détenus arbitrairement pendant plus de deux ans, ne veulent pas être jugés. « Ils ne veulent pas répondre des burkinabè qui sont morts, ils ne veulent pas dire pourquoi, mais ils le diront un jour », insiste-t-il sur ce fait.
Quant à la suite à donner au procès, « nous attendons que les personnes poursuivies, de même que les parties civiles et les témoins soient citées à nouveau pour une nouvelle audience »
Pendant ce temps, c’est la déception du côté de l’association des blessés de l’insurrection populaire et du putsch qui, par la voix de leur président crie son ras-le-bol. « Ce procès est énervant, il faut le dire. C’est vrai que c’est le droit mais on a l’impression que la défense a tout préparé pour empêcher le jugement de progresser, parce que non seulement on n’a pas pu constituer le tribunal qui doit juger. Pour lui, le Général Gilbert Dienderé aurait cité le nom de tous ceux qui sont plus gradés que lui pour les empêcher de siéger pour le jugement, donc l’intention est claire. Ils ne veulent pas aller à un jugement et c’est très décourageant. Ce que nous souhaitons, c’est les questions de fonds. Qui a tué les gens, qui a donné l’ordre de tirer ? c’est ce que nous voulons savoir. Mais si on ne peut pas déjà constituer un tribunal parce que la défense a mis tous les moyens pour empêcher ça, c’est déplorable », Sya Franck, Président de l’association des blessés de l’insurrection populaire et du putsch
Pour l’heure, le procès est suspendu et reprendra le 14 mars prochain.
Alfred Sié KAM/Rédaction QNA